Près d’un mois après le lancement officiel de la rentrée scolaire 2024-2025 en République Démocratique du Congo (RDC), les enseignants des écoles publiques persistent dans leur mouvement de grève. Ce dernier a été déclaré par la synergie des syndicats des enseignants, qui a averti le gouvernement le 28 septembre, soulignant la détermination des enseignants à poursuivre leur action, même si cela devait aboutir à une année scolaire blanche.
La grève, qui a débuté le 2 septembre, jour où la ministre de l’Éducation, Raïssa Malu, a donné le coup d’envoi de l’année scolaire à Tshikapa, est alimentée par des revendications urgentes. Les enseignants exigent une amélioration significative de leurs conditions de travail, notamment une augmentation de leurs salaires mensuels à un minimum de 500 dollars américains.
Dans un contexte de crise éducative, les enseignants de la RDC expriment leur frustration face à l’inaction du gouvernement concernant des revendications essentielles.
« Nous constatons que les écoles ne fonctionnent pas depuis la rentrée scolaire du 2 septembre 2024. Il est déplorable que le gouvernement n’accorde pas d’attention aux revendications des enseignants, en particulier concernant le barème salarial uniformisé pour les enseignants et inspecteurs, ainsi que les conditions de retraite. De plus, le parlement congolais, en tant qu’autorité budgétaire, n’a pas statué sur le salaire minimum de 500 dollars exigé par les enseignants», déplore la déclaration.
Dans un climat de tension croissante, les enseignants de la RDC expriment leurs inquiétudes face aux intimidations et appellent le gouvernement à agir rapidement pour éviter une déstabilisation de l’enseignement.
« Nous dénonçons également les intimidations que subissent les enseignants, contraints de travailler dans des conditions qui nuisent à la sérénité nécessaire à l’enseignement. Nous demandons au gouvernement de répondre aux préoccupations légitimes des enseignants avant le 5 octobre 2024, date de la Journée mondiale des enseignants. Faute de réponse, l’année scolaire 2024-2025 pourrait être déclarée année blanche par l’UNESCO. En attendant, la grève se poursuit, et les enseignants de toutes les provinces se réuniront en assemblée générale le 5 octobre en marge de cette journée», conclut la déclaration de la synergie des syndicats des enseignants.
Actuellement, un enseignant dans les zones rurales perçoit environ 190 000 francs congolais par mois, soit l’équivalent de 50 dollars. Dans les villes, ce montant grimpe à 350 000 francs congolais, soit 125 dollars, selon des témoignages recueillis auprès des enseignants du Nord-Kivu.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que certains enseignants des écoles conventionnées sont accusés par les grévistes de décourager la prise en charge gouvernementale en sollicitant des contributions financières des parents d’élèves. Une pratique qui soulève l’indignation parmi les grévistes, qui estiment que le financement de l’éducation devrait incomber au gouvernement congolais, et non aux familles confrontées à des conditions socio-économiques difficiles, notamment dans la province du Nord-Kivu en proie à une crise sécuritaire persistante.
Les syndicats d’enseignants, visiblement agacés par ces manœuvres, déplorent le fossé grandissant entre les promesses gouvernementales et la réalité sur le terrain.
« Tant que nos revendications ne seront pas satisfaites, nous restons unis dans cette lutte », a déclaré un représentant syndical, insistant sur l’importance d’un salaire décent pour garantir la dignité de la profession.
« Chers collègues enseignants, nous devons évaluer notre situation en fonction des avancées, mais face à l’absence de progrès, je pense qu’il est toujours important de rester chez nous», a indiqué un enseignant gréviste.
La paie complémentaire et la prime de gratuité promises par le gouvernement laissent des enseignants insatisfaits, qui exigent une révision urgente et significative de leurs rémunérations. «Je n’ai reçu que 40 000 francs congolais comme prime de gratuité pour les mois de juin et août», témoigne un enseignant du Nord-Kivu.
Face à cette crise, le gouvernement congolais est sous pression. Les parents, inquiets pour l’avenir de leurs enfants, appellent à une résolution rapide du conflit. La menace d’une année blanche pèse sur le système éducatif congolais, déjà fragilisé par des années de négligence.
Alors que le bras de fer se poursuit, les élèves des écoles privées poursuivent leurs cours sans interruption, pris en charge par les frais scolaires des parents. Pendant ce temps, les enseignants des écoles publiques, déterminés à faire entendre leur voix, attendent des réponses concrètes de la part des autorités.
Le gouvernement de la République Démocratique du Congo, par la voix de la Première ministre Judith Suminwa, a réaffirmé son engagement à répondre aux revendications des enseignants lors de la rentrée scolaire 2024-2025. En mettant l’accent sur l’amélioration des conditions de travail, le gouvernement a souligné l’importance de la collaboration avec les syndicats de l’Éducation nationale, affirmant que sans les enseignants, le progrès est impossible. Il a également réitéré son engagement à maintenir la gratuité de l’enseignement primaire, un principe inscrit dans la constitution depuis 2019, et a négocié des mesures concrètes pour renforcer les conditions socioprofessionnelles des enseignants.
Bien que le gouvernement affiche des intentions positives, la mise en œuvre effective de ces engagements est réclamée, en amont, par les enseignants pour apaiser les tensions et assurer un cadre éducatif propice à tous les élèves congolais.
Jospin HANGI